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Sommet Union africaine-Union européenne : une vitrine inédite

Par DOUNIA BEN MOHAMED - Publié en novembre 2017
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Pour la première fois, l’événement, les 29 et 30 novembre, sera accueilli par une nation subsaharienne. Pour le continent, les enjeux de cette coopération sont essentiels.

L’objectif affiché : « renforcer les liens politiques et économiques entre les deux continents », selon le communiqué officiel publié par l’Union européenne (UE). Les politiques communes « mettront l’accent sur l’investissement dans la jeunesse. Il s’agit là d’une priorité pour l’Afrique comme pour l’UE, 60 % de la population africaine ayant moins de 25 ans ». « Pour l’UE, le défi sera d’adopter une position commune, qui fera de l’Afrique la priorité de ses politiques, ce qu’elle devra faire comprendre à son opinion publique », indique Alain Dupouy, ancien conseiller Afrique d’Alain Juppé, aujourd’hui à la tête d’O2A, « un laboratoire d’idées » qui réunit une cinquantaine de membres. Il a organisé un forum « à huis clos » le 10 octobre à Paris, sur les enjeux de ce sommet.

31 août 2017, à l’Élysée, Paris. Le président Alassane Ouattara et son homologue français Emmanuel Macron, qui sera présent au Sommet UA-UE de novembre.

« Nous n’avons pas la prétention de donner des consignes, mais des recommandations aux responsables français, européens et africains. » Un triptyque pour lequel il résume les enjeux ainsi : « L’UE, alors que nous arriverons en 2020 au terme des accords de Cotonou, devra démontrer, à l’issue de ce sommet, l’orientation qu’elle veut donner à son partenariat avec l’Afrique. Sur le plan économique, fondamental, mais sans négliger la question de la sécurité, sur laquelle elle peut accompagner le continent et les conditions de l’aide au développement. » Autrement dit, qui pourra prétendre au soutien de l’UE, sous quelles conditions, et avec quelles limites.

« L’UE ne pourra plus, par exemple, soutenir des pays qui ne luttent pas contre la corruption. » La France devra, selon lui, réaffirmer son rôle de « tête de pont dans les relations bilatérales entre l’Europe et l’Afrique ». Quant à l’Afrique, représentée par l’Union africaine, co-organisatrice de l’événement, « elle devra créer les conditions de son autonomie. Ce qui est inscrit dans son agenda 2063, très ambitieux même si parfois utopique. Mais elle doit se prendre en charge financièrement. Ce qui ne veut pas dire qu’elle ne peut pas bénéficier du soutien de l’UE. Dans le domaine de la sécurité notamment ».

Un point sur lequel les sociétés civiles africaines expriment de nombreuses attentes. Les acteurs économiques se retrouveront le 27 novembre lors du 6e Forum des affaires UE-Afrique. Ils attendent de leurs dirigeants « davantage de protectionnisme », lâche un membre du secteur privé ivoirien. « Les APE (Accords de partenariat économique) notamment doivent être renégociés. Les Européens n’hésitent pas à protéger les acteurs économiques de leur continent, par des subventions et en limitant l’accès au marché européen. » Sur la question de l’immigration, pourtant, elle commence à le faire. Assumant leurs responsabilités, les leaders africains ont formulé une position commune, depuis les accords de La Valette, en novembre 2015, dans lesquels ils s’engagent à s’impliquer davantage contre les trafics et l’immigration clandestine. Mais, en contrepartie, ils attendent un plus large soutien de l’UE. Principalement en termes d’investissements en faveur du développement socio-économique du continent. Cette double question sera incontestablement au cœur du sommet. Mais c’est davantage dans les coulisses qu’elle se négociera…

Pour la Côte d’Ivoire, le défi est tout autre : réaffirmer sa stabilité, en s’assurant de la tenue de l’événement « sans heurts », selon un acteur public ivoirien ; renforcer son partenariat avec l’Union européenne ; plus largement s’imposer comme le pendant de la France, être une « tête de pont » dans les relations euro-africaines.