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Cinéma

Détroit, Téhéran Tabou, Knock... Ces films que vous ne devez pas rater

Par Jean Marie Chazeau - Publié en octobre 2017
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S’appuyant sur un long travail d’investigation, Kathryn Bigelow revient sur un épisode particulièrement sombre de l’histoire des États-Unis : les émeutes raciales de 1967, dans le Michigan, très violentes et réprimées dans le sang. Un film intense et oppressant. Voici nos recommandations « Écrans » du mois d'octobre.
 
 
Les démons de Detroit
 
Il y a cinquante ans, des émeutes raciales à Detroit, au nord-est des États-Unis, faisaient 43 morts, des centaines de blessés, près de 1 700 incendies et plus de 7 000 arrestations. Cinq jours d’affrontements très violents entre Afro-Américains et policiers soutenus par l’armée. Kathryn Bigelow, la réalisatrice de Zero Dark Thirty (sur les derniers jours de Ben Laden), reconstitue très efficacement la violence de ces journées, avant de s’attarder longuement sur un épisode qui tourne au film d’horreur : de jeunes Blacks qui n’étaient pas du tout mêlés aux émeutiers se retrouvent séquestrés par des policiers (blancs) alertés par des tirs entendus du côté de l’Algiers Motel où ils résident.
DETROIT » (États-Unis) de Kathryn Bigelow. Avec John Boyega, Will Poulter, Algee Smith.
Un agent de sécurité noir se mêle à l’action, spectateur impuissant et sidéré par la violence psychologique puis physique exercée par ces policiers qui semblent avoir carte… blanche, pensant avoir affaire à des tireurs embusqués ou au moins à leurs complices, et tentent de les faire passer aux aveux.
 
L’action partagée avec le spectateur se déroule presque en temps réel, et c’est d’autant plus oppressant. Une restitution minutieuse des faits (pas moins de six enquêteurs ont rencontré les témoins de l’époque et travaillé sur toutes les archives possibles) rend justice aux victimes de cette nuit-là. Les dernières séquences virent au film de procès, classique, et on reste un peu sur sa faim faute de mise en perspective politique, malgré un très beau générique retraçant des décennies de ségrégation raciale. Mais ce procès oublié ainsi mis en lumière rencontre forcément un écho dans l’Amérique post-Obama du mouvement Black Lives Matter.
 
 
Animation
SEXE, ARGENT… ET RÉPUBLIQUE ISLAMIQUE
 
« TÉHÉRAN TABOU » (Allemagne) d’Ali Soozandeh. Avec Elmira Rafizadeh, Zar Amir Ebrahimi.
 
Comment parler des tabous religieux et des non-dits d’une république islamique verrouillée par les mollahs ? Le cinéaste iranien Ali Soozandeh réussit à montrer la corruption, les abus de pouvoir, la prostitution, les amours hors mariage… en nous plongeant au coeur de la grouillante Téhéran. Une capitale dessinée, plus vraie que nature, d’autant que les personnages sont des comédiens, comme repassés au pochoir : c’est un autre genre d’animation, qui permet une immersion dans le réel très réussie. Malgré des baisses de régime dans la narration, le film accroche par la qualité des personnages, dont une prostituée au caractère bien trempé, qui emmène partout son petit garçon, le laissant à la porte de la chambre de ses clients…
 
 
 
« BARBERSHOP-CHÂTEAU D’EAU » (sur Canal+ Afrique, du lundi au vendredi à 20h25). Avec Dykosh, Jean Bédiébé, Ivanne Niaba, Frédéric Bukolé.
Télévision
Garçon, une coupe !
Des clients qui défilent dans un salon de coiffure afro parisien, et des punchlines qui fusent : la nouvelle mini-série de Canal+ Afrique réussit à faire rire tout le continent avec sa distribution panafricaine(et quelques guests : Claudia Tagbo, Tatiana Rojo, Jessy Matador…), son tempo serré et une réalisation soignée. Auteur et acteur principal : le YouTubeur Dycosh. « C’est un clin d’oeil à tout ce qui a pu se faire aux États-Unis, explique-t-il. Dans la diaspora, le barbershop, c’est un lieu de rassemblement de plusieurs cultures, et le métro Châteaud’Eau, un carrefour de l’Afrique. » Vivement la saison 2 !
 
« KNOCK » (France) de Lorraine Lévy. Avec Omar Sy, Alex Lutz, Pascal Elbé.
Remake
KNOCK, LE MÉDECIN IMAGINAIRE
Un ex-escroc reconverti en médecin fait fortune en persuadant les habitants d’un village que « tout bien portant est un malade qui s’ignore »... En donnant à Omar Sy un grand rôle classique du cinéma français, la réalisatrice transpose le héros d’Intouchables dans une France des années 50 volontairement exempte de tout racisme. Une seule scène évoque la « couleur » du nouveau docteur… Très gênant pour la crédibilité de l’histoire, même dans une comédie pleine de bons sentiments. Trop d’ailleurs : à vouloir apparaître solaire et humain, Omar Sy rate l’occasion d’incarner un grand personnage trouble et inquiétant, ce que lui offrait pourtant ce Knock.