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Cinéma

Échec au cheik ?

Par Jean Marie Chazeau - Publié en juin 2021
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 Aïcha Talla dans le rôle de Nafi
Aïcha Talla dans le rôle de Nafi. JHR FILMS 

​​​​​​​Une tragédie antique sur les rives du fleuve Sénégal et un beau premier film multiprimé.

Affiche
DR

Nafi va se marier avec son cousin, seul moyen, pense-t-elle, de pouvoir quitter son village et partir avec lui étudier à Dakar. Son père, imam humble et bienveillant, l’y encourage… mais pas son oncle, qui veut prendre une revanche personnelle sur son frère. Il fait alors venir un islamiste pour faire pression sur la population et imposer une lecture radicale et tronquée du Coran, afin de prendre le contrôle de la cité. Quand les partisans du cheik crèvent les ballons des enfants ou s’en prennent aux tenues des femmes, on pense à Timbuktu, d’Abderrahmane Sissako, même si l’ambition esthétique n’est pas aussi aboutie. La tragédie se met en place, lentement, dans ce village coincé entre le désert et le fleuve Sénégal, au rythme du pulaar. C’est là (à Matam, rebaptisé Yonti à l’écran) qu’est né le réalisateur, Mamadou Dia, lui-même fils d’imam, parti étudier le cinéma à New York. Son film montre bien comment le poison islamiste peut se répandre avec la complicité passive des notables, mais aussi d’une partie des habitants. Il s’attarde aussi sur les beaux personnages qui composent la cellule familiale autour de la figure de l’imam, avec dans le rôle-titre Alassane Sy, l’un des deux comédiens professionnels du long-métrage, rayonnant de calme et de douceur. Résultat : des prix bien mérités dans de nombreux festivals, de Locarno à Montréal, en passant par Namur et Louxor. 

LE PÈRE DE NAFI (Sénégal), de Mamadou Dia. Avec Alassane Sy, Saikou Lô, Aïcha Talla.